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Ses yeux étincellaient, perdus dans le givre de sa barbe. Elle les fermait à intervalles irréguliers, sans rythme apparant. Les mots « Ne laisse pas la peur s'emparer de ton esprit ! » apparurent dans mon esprit, sans que je sois sûr qu'ils viennent bien de moi. « Peut-être faudrait-il que je m'ouvre à cet être face à moi ? » ; encore une fois, l'origine de cette pensée me semblait incertaine. « Je ne te veux aucun mal. » Cette fois, j'en étais sûr, la lame dans ma main le prouvait : ces mots, bien que résonnant dans ma tête, ne venaient pas de moi.

Quel monstre vicieux, me faire croire, après avoir détruit ma famille, que je ne lui voulait aucun mal. Mais déjà les certitudes s'éloignaient de moi, ou du moins, j'en avais l'impression. Une seule chose de sûre : elle m'attendait. Elle m'attendait, moi et ma lame, et ne souhaitait pas se défendre. Elle ne souhaitait pas me faire croire que je l'aimais, ni même que je la tolérais. Comme si elle souhaitait embrasser ma lame.

Les yeux de son cou semblaient emprunts d'une telle mélancolie. Peut-être ne fallait-il pas que je la tue, mais que je l'aide ? Ses paumes me regardaient, implorantes. Peut-être que ma meilleur vengeance n'était pas sa mort, mais la réparation de ses torts ? Au creux de ses coudes, les larmes s'écoulaient doucement. Peut-être que pour me sauver, il me fallait la protéger, même. «Ne faiblis pas !» je m'entendis penser.

Ma décision était prise : j'allais lui offrir ma lame, la lame ancestrale de ma famille, tout ce qui me restait d'elle. Dans un instant suspendu, je me vis m'agenouiller, lui présentant mon arme sur mes paumes ouvertes. La seconde qui suivi dura un millénaire, durant lequel ses ailes s'ouvrirent, s'étendirent, m'enveloppèrent. Je compris son histoire, je vécu ses vies, je vis le monde de ses yeux.

Je me réveillais de son étreinte sans la notion du temps, et tandis que j'ouvrais les paupières, anciennes et nouvelles, une pensée m'obsédait : « Merci ! »


CC BY-NC-SA 4.0, écrit avec amour par GLenPLonk