The den

Ses yeux étincellaient, perdus dans le givre de sa barbe. Elle les fermait à intervalles irréguliers, sans rythme apparant. Les mots « Ne laisse pas la peur s'emparer de ton esprit ! » apparurent dans mon esprit, sans que je sois sûr qu'ils viennent bien de moi. « Peut-être faudrait-il que je m'ouvre à cet être face à moi ? » ; encore une fois, l'origine de cette pensée me semblait incertaine. « Je ne te veux aucun mal. » Cette fois, j'en étais sûr, la lame dans ma main le prouvait : ces mots, bien que résonnant dans ma tête, ne venaient pas de moi.

Quel monstre vicieux, me faire croire, après avoir détruit ma famille, que je ne lui voulait aucun mal. Mais déjà les certitudes s'éloignaient de moi, ou du moins, j'en avais l'impression. Une seule chose de sûre : elle m'attendait. Elle m'attendait, moi et ma lame, et ne souhaitait pas se défendre. Elle ne souhaitait pas me faire croire que je l'aimais, ni même que je la tolérais. Comme si elle souhaitait embrasser ma lame.

Les yeux de son cou semblaient emprunts d'une telle mélancolie. Peut-être ne fallait-il pas que je la tue, mais que je l'aide ? Ses paumes me regardaient, implorantes. Peut-être que ma meilleur vengeance n'était pas sa mort, mais la réparation de ses torts ? Au creux de ses coudes, les larmes s'écoulaient doucement. Peut-être que pour me sauver, il me fallait la protéger, même. «Ne faiblis pas !» je m'entendis penser.

Ma décision était prise : j'allais lui offrir ma lame, la lame ancestrale de ma famille, tout ce qui me restait d'elle. Dans un instant suspendu, je me vis m'agenouiller, lui présentant mon arme sur mes paumes ouvertes. La seconde qui suivi dura un millénaire, durant lequel ses ailes s'ouvrirent, s'étendirent, m'enveloppèrent. Je compris son histoire, je vécu ses vies, je vis le monde de ses yeux.

Je me réveillais de son étreinte sans la notion du temps, et tandis que j'ouvrais les paupières, anciennes et nouvelles, une pensée m'obsédait : « Merci ! »


CC BY-NC-SA 4.0, écrit avec amour par GLenPLonk

In a place, somewhere over the rainbow, over the clouds, over the sun, over the stars, over the dimest, most ancient celestial bodies, there is an ancient celestial mind. Is it a godlike mind? I don't know. I've never met one, so, how could I know? I guess it depends on how one defines godlike, and thus, what is divine, and how close to divine something needs to be to be godlike. Yet, that is not the point. This mind, as I said — even though I'm not sure one can picture what a mind without a body is — is. It is, but can it act? Can it do something? Anything at all? Surely it does, because, how could we know it even exists, without any body nor any way of showing us it exists? Yet, that is not the point. Is it benevolent or malevolent in its actions ? To knnow that, we would need its agenda: why does it do what it does? One can agree on the fact that the good-or-bad scale depends on one's core values. So, we're left wondering about its very will. Yet, that is not the point. What is the point, then? Why do care talking about it? I don't know, for sure. Maybe, it can only love. Not some weird, fascinated unconditional love, but really, loving something — someone — for it or them being beautiful, not necesarily by its or their physical form, but maybe because it brings joy or happiness or melancholy or the wish to have eyes to cry.


CC BY-NC-SA 4.0, écrit avec amour par GLenPLonk

Le problème de la lumière au bout du tunnel, c'est qu'elle est aveuglante. Dans un lieu sombre et morne et gris, une telle luminosité, tant de lumière, tellement éclatante, riche, vibrante, enveloppante… c'est trop. C'est trop, et surtout, c'est aveuglant. On ne voit plus rien, on ne sait plus où on met les pieds, on risque de tomber dans le caniveau à chaque pas. C'est presque dangereux : on veut fermer les yeux, faire demi-tour ; on espère un retour à la normale, quoi que cela veuille dire. Pourtant, elle persistait à garder les yeux ouverts, malgré la douleur que cela lui causait. Comment était-elle arrivée là, elle n'en avait aucune idée, mais elle voulait sortir. Peut-être que la lumière était trop vive, mais au moins, elle réchauffait son cœur et son esprit, engourdis par la platitude environnante. Le terme ““tunnel”” était pourtant bien choisi, étonnamment. Elle était sur une sorte de route, plutôt lisse, grise et froide, entourée par … quelque chose. Une sorte de fluide, ou plutôt, du vide, mais pas celui de l'espace, baigné d'étoiles scintillantes, mais vraiment du vide terrifiant car synonyme d'absence et de perte. Rien en elle ne lui donnait envie de s'en approcher, or, sa route en était bordé des deux côtés. Maintenant que ses yeux s'étaient un peu habitués à la lumière, elle voyait mieux le paysage. Et il n'y avait rien à voir, même pas une source de lumière, rien, juste le vide, elle et la route. Sa route, justement, partait à l'infini des deux côtés, devant et derrière. Fait surprenant, et que l'on remarque immédiatemment lorsqu'on y est confronté et que l'on a l'habitude du contraire, il n'y avait pas d'horizon, à aucun moment la route ne disparaissait derrière la courbure d'une planète. Rien qu'à y penser, elle eut les larmes aux yeux : comment était-elle arrivée ici ? Où était “ici” ? Que faisait-elle avant de venir ? Elle se souvenait de tout : ses ami⋅es, ses collègues, sa compagne, son appartement, son travail, ses chats, sa famille, Xzerð, … Mieux que ça, elle ressentait tout : les voix de Camille, Gwen, Orüen et Pierre lui revenait, elle les entendait presque, elle sentait l'odeur des pâtes et de la sauce qui mijotait sur le feu, les fourrures toute douces du Chat et du Félin, … – Bon, elle reprend des couleurs, ça a l'air d'aller mieux. – Doucement, bouge pas trop vite ! Cette fois, elle en était sûre. Ce sont les voix de Camille et de Gwen. – Mraw ! Et le miaulement si caractéristique du Félin. La lumière avait encore changé, et elle du ouvrir les yeux à nouveau, persuadée de ne jamais les avoir fermé.


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Sa chevelure était flamboyante, parée de reflets de mille couleurs, éclatante, illuminée de teintes inimaginables, vibrante, transfigurée d'une grâce sans pareille. Mais sa solitude aussi était immense, à mille facettes, inimaginable, sans pareille. Sa voix était forte, mélodieuse, belle, envoûtante. Et sa tristesse était toujours là, toisant tout telle un donjon de château-fort, toujours là, inhibant tout telle un bruit de fond, toujours là, anesthésiant tout telle la douleur d'une épine de rose, toujours là, enveloppant tout telle le froid des catacombes.


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De toute façon, il fallait bien qu'elle vole ces plumes. “Seul·es les anges ont des ailes” dit-on, mais qui dit ça n'a jamais vu de poulet. Et justement, voilà la flicaille qui arrive. Comment étaient-iels dejà là ? Mystère. Mais maintenant, il faut fuir. Encore une fois. Une course poursuite, voilà bien tout ce qu'il lui fallait. Hop, au-dessus du nuage. Hop, en rase-motte dans la forêt. Hop, montée en flèche. Et hop, retour sur Terre, dans le château de son père. À peine débarquée, douchée, peignée, habillée, reposée, voilà que que la maréchaussée s'invite : il paraît qu'un crime horrible vient d'être commis, un·e ange cruellement mutilé·e, ses ailes dérobées. “Enfin, faîtes attention à vous Mademoiselle, quand vous vous promenez la nuit, vous ne voudriez pas qu'on vous vole votre élégant boa” ont-iels même dit en repartant.


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Je me réveillais comme les autres matins tout contre lui, et je contemplais entre deux bouts de draps sa respiration régulière et silencieuse. Il était beau comme ça et même si tous les matins j'ai cette vue, je le trouvais encore plus beau aujourd'hui. La nuit avait été agréable, reposante même. Dans la pénombre de l'aube, j'ai vu la chatte monter sur mon — enfin, nôtre — lit. La mezzanine lui plaît, je crois, de là-haut elle peut voir tout l'appartement. Puis elle s'est mise à ronronner après s'être lovée contre moi, dans le creux du cou, posé sur mon épaule. Un éclair d'un rêve de cette nuit m'est revenu : une histoire de piraterie, de Fenrir, d'aventuriers et de retour à la maison. C'est encore maintenant assez flou, mais c'est là le propre des rêves. C'est à ce moment que j'ai réalisé que je rêvais encore : d'habitude, je dors de l'autre côté du lit, on a plus de mezzanine depuis notre déménagement — au grand dam du chat — et nos draps ne sont pas aussi jolis. Quand je me suis enfin réveillé, j'avais la chatte endormies, la tête posée sur mon torse et il dormait paisblement à côté de moi ; sa respiration était régulière. Un matin comme les autres, en somme.


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[ndlr : cette histoire se déroule dans un autre univers, avec une autre notion de réalité. Les concepts de matière, d'existence, de temps, ... ne sont pas les mêmes que pour nous. Comment, dans ces conditions, raconter une histoire ?]


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Elle était heureuse. Elle ne savait pas pourquoi : ce n'était pas le sable du désert, qui lui brûlait les pieds, le soleil couchant qui la frappait dans les yeux et la forçait à les fermés, ni même le paysage, qu'elle trouvait pourtant habituellement beau. Ce n'était, semblait il, pas non plus la présence de sa famille, une dune derrière elle, qui la réconfortait ; ni même ses amis assis à côté d'elle. Ou peut-être qu'au contraire, c'était tout ça réuni qui la rendait heureuse. Mais elle préféra arrêter de s'en préoccuper et revenir vers le jeu. Elle se détourna de ses pensées en demandant : “Vlu cuisj ?”


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Iel tapait dans la console : $happyness := true;. Mais sans même lui laisser une seconde de répit, la console lui répondait : >Forbiden command, you do not have the right to perform this action. Alors iel pleurait, autant parce qu'iel n'arrivait pas à changer cette ligne de code que par malheur. Un étage de réalité au dessus, Paul riait de cette situation en voyant son écran.


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J'ai tant appris qu'à la fin, tout est triste, que je ne connais plus la joie. La joie de voir le monde qui m'entoure, sa beauté, ses merveilles, ses exubérances, son originalité. Je me suis trop habitué à ne plus rien ressentir d'autre que la platitude d'une routine que je ne sais plus être heureux⋅se. Peut-être qu'à la fin, il n'y a plus rien, juste l'absence de conscience, mais ça ne dois pas m'empêcher de profiter, tant que je le peux, de la vie. Effectivement, je crois à la finitude de la conscience humaine, et même, je ne suis pas sûr⋅e de l'existence de cette dernière. Mais autant vivre, pour aider les autres à vivre, pour l'émerveillement dans les interactions. “Ah, tu fais ta pâte à tarte comme ça ?”, “J'aime bien la façon dont tu tiens ton crochet !”, “Cette façon de voir cette preuve est belle et originale, je vais essayer de m'en souvenir !”, …, autant de façon de découvrir les autres personnes, de comprendre comment elles perçoivent l'extérieur. C'est ça, finalement, exister : c'est sentir et penser des choses de manière unique, comme personne d'autre avant. C'est peut-être aussi ça qui me terrifie : si je change, serais-je encore moi-même ?


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