Le problème de la lumière au bout du tunnel, c'est qu'elle est aveuglante. Dans un lieu sombre et morne et gris, une telle luminosité, tant de lumière, tellement éclatante, riche, vibrante, enveloppante… c'est trop. C'est trop, et surtout, c'est aveuglant. On ne voit plus rien, on ne sait plus où on met les pieds, on risque de tomber dans le caniveau à chaque pas. C'est presque dangereux : on veut fermer les yeux, faire demi-tour ; on espère un retour à la normale, quoi que cela veuille dire.
Pourtant, elle persistait à garder les yeux ouverts, malgré la douleur que cela lui causait. Comment était-elle arrivée là, elle n'en avait aucune idée, mais elle voulait sortir. Peut-être que la lumière était trop vive, mais au moins, elle réchauffait son cœur et son esprit, engourdis par la platitude environnante.
Le terme ““tunnel”” était pourtant bien choisi, étonnamment. Elle était sur une sorte de route, plutôt lisse, grise et froide, entourée par … quelque chose. Une sorte de fluide, ou plutôt, du vide, mais pas celui de l'espace, baigné d'étoiles scintillantes, mais vraiment du vide terrifiant car synonyme d'absence et de perte. Rien en elle ne lui donnait envie de s'en approcher, or, sa route en était bordé des deux côtés.
Maintenant que ses yeux s'étaient un peu habitués à la lumière, elle voyait mieux le paysage. Et il n'y avait rien à voir, même pas une source de lumière, rien, juste le vide, elle et la route.
Sa route, justement, partait à l'infini des deux côtés, devant et derrière. Fait surprenant, et que l'on remarque immédiatemment lorsqu'on y est confronté et que l'on a l'habitude du contraire, il n'y avait pas d'horizon, à aucun moment la route ne disparaissait derrière la courbure d'une planète.
Rien qu'à y penser, elle eut les larmes aux yeux : comment était-elle arrivée ici ? Où était “ici” ? Que faisait-elle avant de venir ? Elle se souvenait de tout : ses ami⋅es, ses collègues, sa compagne, son appartement, son travail, ses chats, sa famille, Xzerð, … Mieux que ça, elle ressentait tout : les voix de Camille, Gwen, Orüen et Pierre lui revenait, elle les entendait presque, elle sentait l'odeur des pâtes et de la sauce qui mijotait sur le feu, les fourrures toute douces du Chat et du Félin, …
– Bon, elle reprend des couleurs, ça a l'air d'aller mieux.
– Doucement, bouge pas trop vite !
Cette fois, elle en était sûre. Ce sont les voix de Camille et de Gwen.
– Mraw !
Et le miaulement si caractéristique du Félin. La lumière avait encore changé, et elle du ouvrir les yeux à nouveau, persuadée de ne jamais les avoir fermé.
CC BY-NC-SA 4.0, écrit avec amour par GLenPLonk